Confronté à une situation de travail présentant un risque de dommage pour sa vie, le travailleur dispose du droit d’alerte et du droit de retrait.
L’exercice du droit d’alerte :
L’obligation de sécurité à la charge du travailleur implique le signalement de « toute défectuosité constatée dans les systèmes de sécurité » (article Lp. 261-10, 4° du CTNC), et de toute situation de danger dépassant le risque liée à l’activité professionnelle (article Lp. 261-3 du CTNC).
Dès lors que le droit d’alerte est exercé par le salarié, l’employeur a l’obligation de faire cesser la situation dangereuse avant de lui demander de reprendre son activité (article Lp. 261-21 du CTNC).
Comment exercer le droit d’alerte ?
- L’alerte peut être donnée verbalement (CE 12 juin 1987, n° 72388).
- Les textes n’imposant aucune procédure, aucun règlement intérieur ne peut imposer un écrit pour signaler une situation dangereuse à laquelle le travailleur est exposé (CE 29 juin 1990, n° 87015).
- L’exercice du droit d’alerte n’est pas conditionné à la mise en œuvre de la procédure d’alerte du comité d’hygiène et de sécurité et des conditions de travail (Cass. Soc. 10 mai 2001, n° 00-43.437).
En pratique
Il est conseillé de signaler les disfonctionnements compromettant la sécurité au travail :
- soit dans le registre (recueil) de sécurité ou de carnet d’entretien d’installations, de machines, et d’engins ;
- soit au représentant du personnel au sein du CE, du CHSCT, ou au délégué du personnel à l’appui de fiche technique par exemple ;
- soit d’en informer l’employeur. En l’absence de CE, de CHSCT, ou de délégué du personnel, l’essentiel c’est de garder des preuves des signalements qui lui ont été transmis.
Article Lp. 261-21 du CTNC :
Le travailleur alerte immédiatement l’employeur ou son représentant de toute situation de travail dont il a un motif raisonnable de penser qu’elle présente un danger grave et imminent pour sa vie ou sa santé.
L’employeur ou son représentant ne peut demander au travailleur de reprendre son activité dans une situation de travail où persiste un danger grave et imminent.
Article Lp. 261-23 du CTNC :Le droit d’alerte est exercé de telle manière qu’il ne puisse créer pour autrui une nouvelle situation de risque grave et imminent.
Peut-on être sanctionné pour ne pas avoir alerté son employeur ?
L’article Lp. 261-21 du CTNC fait obligation au salarié de signaler immédiatement la défectuosité ou le danger motivant son refus de travailler.
Est constitutive d’une faute grave justifiant un licenciement sur le plan disciplinaire, le fait pour le salarié de ne pas alerter son employeur dès lors qu’il a conscience du danger, et que cette omission place ses collègues dans l’insécurité (Cass soc. 21 janv. 2009, n° 07-41.935).
En revanche, rien ne peut être reproché au salarié qui n’avait pas conscience du danger, ni à celui qui n’a pas été en mesure de donner l’alerte
Au regard de l’obligation faite au travailleur de veiller à sa sécurité et à celle des autres personnes concernées par ses actes et omissions au travail (article Lp. 261-10 du CTNC), le juge admet que sa responsabilité puisse être engagée (Cass. soc. 28 mai 2008, n°06-40.629).
L’exercice du droit de retrait
Exercé en cas de carence de l’employeur averti de la situation de travail dangereuse, le droit de retrait est un droit et non une obligation (Cass. 9 déc. 2003, n° 02-47579).
Dès lors que le travailleur a un motif raisonnable de penser que la situation présente un danger grave et imminent pour sa santé et sa sécurité il peut décider de s’en extraire sans être sanctionné par son employeur.
Article Lp. 261-22 du CTNC :
Aucune sanction, aucune retenue de salaire ne peut être prise à l’encontre d’un travailleur ou d’un groupe de travailleurs qui se sont retirés d’une situation de travail dont ils avaient un motif raisonnable de penser qu’elle présentait un danger grave et imminent pour la vie ou la santé de chacun d’eux.
Ces dispositions ne peuvent être appliquées qu’en cas de carence de l’employeur ou de son représentant devant la situation de travail qui lui a été présentée soit par le salarié lui-même, soit par un membre du comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail.
Quelle situation de travail justifie l’exercice du droit de retrait ?
Quelques situations constitutives d’un danger grave et imminent pour la vie des travailleurs dans lesquelles l’exercice du droit de retrait est justifié :
- la défaillance du système de freinage du camion de l’entreprise constitue un danger grave et imminent pour la vie du salarié conducteur (CA Montpellier 30 avril 1998, n° 96/00627) ;
- l’interdiction de circuler d’un camion constitue un motif permettant au salarié chauffeur de refuser de le conduire (Cass. 5 juillet 2000, n° 98-43-481) ;
- le défaut persistant de conformité des installations de l'entreprise avec les normes de sécurité est constitutif d'une situation dangereuse pour leur vie ou leur santé et permet aux salariés de cesser leur travail (Cass. soc. 1er mars 1995, n° 91-43406).
En revanche, ne constitue pas un risque, ni un motif raisonnable de nature à justifier que le salarié se retire de son poste de travail :
- le seul fait de travailler sur un site nucléaire (CA Versailles, 26 février 1996, n° 22877/94) ;
- la présence d’amiante dans l’entreprise (CA Bourges, 15 mai 2009, n° 08/01329>.
L’intervention du Comité d’Hygiène, de Sécurité et des conditions de travail en cas de danger (Article Lp. 262-1 et suivants du CTNC).
Dans les établissements de plus de 50 salariés (effectif en continu pendant 12 mois consécutifs), le CHSCT est investi de missions d’analyse des risques professionnels, des conditions de travail.
A cet effet, il propose des missions de prévention des risques professionnels et a le pouvoir de procéder à la vérification (inspections et enquêtes) du respect des prescriptions législatives et réglementaires et de la mise en œuvre des mesures de prévention préconisées (article Lp. 262-7 du CTNC).
Le CHSCT peut recourir, aux frais de l'entreprise, à un expert agréé en cas de risque grave constaté (article Lp. 262-26 du CTNC).
Le CHSCT peut également avoir recours à l'expert intervenant auprès du comité d'entreprise à l'occasion de l'introduction de nouvelles technologies dans l'entreprise.
Dans les entreprises de moins de 50 salariés, le délégué du personnel endosse les missions de CHSCT (Pour en savoir plus se reporter à la fiche CHSCT).